Page:Curie - Traité de radioactivité, 1910, tome 1.djvu/231

Cette page a été validée par deux contributeurs.

identique avec l’actinium, a été amené à observer sur les produits obtenus la production d’une émanation radioactive qui s’échappe très facilement de la substance ; cet effet caractéristique détermina le choix du nom émanium que M. Giesel proposa pour la substance ([1]).

On ne connaît jusqu’à présent aucune autre émanation radioactive en plus de celles qui sont émises par le thorium, le radium et l’actinium. Les émanations qui proviennent de ces trois substances sont d’ailleurs de nature différente ; elles se distinguent entre elles par leur persistance inégale. Pendant que l’émanation du thorium a son activité réduite à moins de 1 pour 100 en un temps égal à 10 minutes, le même résultat est obtenu pour l’émanation du radium en un mois seulement, et pour l’émanation de l’actinium au bout d’une demi-minute.

Les émanations ne peuvent traverser aucun écran solide exempt de trous, si mince qu’il soit.

Il existe une relation entre les émanations et les radioactivités induites. Les substances qui donnent lieu à une production de radioactivité induite sont les mêmes que celles qui émettent des émanations. L’ensemble des recherches sur le mode de production de la radioactivité induite prouve que cette dernière ne se développe sur les corps solides que lorsque ceux-ci se trouvent au contact de l’émanation. L’émanation peut ainsi être considérée comme la cause qui donne naissance à la radioactivité induite.

Le mot émanation, qui évoque l’idée d’un gaz, a été proposé par M. Rutherford déjà en 1900, pour désigner la cause du phénomène radioactif localisé dans le gaz qui entoure la substance active. Cette notation ne s’est pas imposée de suite parce qu’on manquait totalement d’indications relatives à la nature du phénomène. M. Rutherford a eu une intuition très heureuse en considérant les émanations comme des gaz matériels émis en très petite quantité par les substances actives. Cette hypothèse a reçu des confirmations de diverse nature par des travaux qui, principalement, ne datent que de 1903. En même temps le nom d’émanation a été définitivement adopté. On peut considérer aujourd’hui que la nature matérielle de l’émanation du radium a été rendue cer-

  1. Giesel, Chem. Ber., 1902.