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quelque temps à l’attention ; elle a été signalée pour la première fois par M. Giesel en 1900, et n’a été reconnue avec certitude que quelque temps après. On sait actuellement que la radioactivité du polonium persiste pendant deux à trois ans.

Toutefois, au courant de la première analyse de la pechblende, effectuée en 1898, nous avons observé, P. Curie et moi, un curieux phénomène d’activité temporaire. Nous avons chauffé la pechblende dans le vide, et nous avons recueilli les produits gazeux de la sublimation. Le gaz obtenu, enfermé dans un tube de verre, agissait encore à l’extérieur comme un corps notablement radioactif. Pendant un mois le rayonnement issu de ce gaz nous donna des impressions photographiques et provoqua la décharge des corps électrisés ; mais l’activité diminuait peu à peu et finit par disparaître complètement. Au spectroscope le gaz actif montrait les raies de l’oxyde de carbone. La pechblende contient d’ailleurs de l’argon et de l’hélium. Nous nous sommes assurés que l’oxyde de carbone, l’argon et l’hélium ne sont pas radioactifs. La nature de ce gaz radioactif n’ayant pu être étudiée à cette époque, son observation est restée à l’état de fait isolé et n’a été publiée qu’en 1900 ([1]). On sait aujourd’hui que le gaz que nous avions obtenu devait contenir de l’émanation du radium.

Ce premier exemple d’une activité temporaire ayant été alors laissé de côté devant l’effort qu’exigeait le travail que nous avions entrepris en vue de l’extraction des substances radioactives nouvelles, la conception de radioactivité permanente restait prépondérante, quand eut lieu en 1899 la découverte d’un fait nouveau de haute importance : la radioactivité induite. Cette découverte est venue nous apprendre qu’il existe des formes de radioactivité essentiellement éphémères, dont la durée ne dépasse pas quelques heures. La découverte de la radioactivité induite a été bientôt suivie par celle des émanations radioactives qui offrent un nouvel exemple de formes de radioactivité à durée limitée entre une minute et un mois. Enfin les recherches sur la radioactivité de l’uranium et du thorium ont prouvé que les procédés de l’analyse chimique conduisent dans certains cas à la séparation de matières qui ont tous les caractères des corps radioactifs, mais dont la radio-

  1. Rapport au Congrès de Physique.