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telle que l’action de la lumière ou d’une élévation de température. De plus, l’action de la substance est intimement liée à un certain état moléculaire ; un métal qui émet des ions négatifs sous l’action de rayons ultraviolets perd cette propriété quand il se trouve à l’état de combinaison, et le phénomène est si sensible que l’émission dépend essentiellement de l’état de la surface et se trouve influencée par une oxydation imperceptible de celle-ci.

Les phénomènes de production d’ions qui dépendent de l’état moléculaire sont, en général, influencés par la température.

La faculté de produire une impression sur une plaque photographique ne peut pas non plus à elle seule servir de criterium pour établir qu’une substance est radioactive. On connaît aujourd’hui un grand nombre de substances, susceptibles de produire de telles impressions à l’abri de la lumière au bout d’un temps plus ou moins long ; tels sont, par exemple, certains métaux : zinc, aluminium, et plusieurs corps organiques : résines et essences ([1]). Il est difficile de reconnaître la véritable nature de ces phénomènes, souvent extrêmement faibles. On a cherché à les expliquer par la formation de gaz ou vapeurs possédant des propriétés réductrices. Quoi qu’il en soit, il est certain que là encore on a affaire à des phénomènes qui dépendent de l’état moléculaire des substances et de la température, et ne possèdent nullement le caractère atomique.

Les substances qui ont été nommées radioactives sont celles qui émettent spontanément des rayons Becquerel, l’émission étant liée à une espèce d’atomes déterminée. La spontanéité de l’émission et son caractère atomique sont donc les caractères essentiels de la radioactivité.

La radioactivité des composés d’uranium et de thorium semble permanente. On connaît toutefois des substances qui, tout en rentrant dans la catégorie des corps radioactifs d’après la définition ci-dessus, ne semblent pas avoir une radioactivité permanente. Tel est le polonium qui n’a pas encore été isolé, mais que l’on a obtenu mélangé à des substances inactives ; la radioactivité de ces

  1. Russell, Proc. Roy. Soc., 1897.