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tité et la nature des gaz en présence n’ont pas d’influence sur la radioactivité induite.

Le résultat n’est pas le même lorsque, au lieu de faire un vide partiel dans le tube, on y fait un vide très parfait (pression mesurée à la jauge inférieure à de millimètre de mercure), et lorsqu’on maintient ce vide pendant toute la durée de l’expérience, en faisant marcher la trompe à mercure d’une façon continue. Dans ces conditions le corps ne s’active pas ; bien plus, s’il a déjà été activé, son activité disparaît. Ainsi la radioactivité induite ne se propage plus lorsqu’on supprime toute pression dans l’appareil.

Si, après avoir fait un vide très parfait, on isole l’appareil de la trompe, on constate, au bout d’un temps plus ou moins long, que la lame de cuivre s’est activée aussi fortement que dans l’air. Mais, en même temps que la lame s’active, des gaz occlus se dégagent de la substance active et déterminent dans le tube une faible pression dont la grandeur varie avec l’échantillon étudié. On peut recueillir les gaz occlus dont l’apparition coïncide avec celle de la radioactivité induite. Pour cela on fait d’abord un vide aussi parfait que possible sur la substance radioactive, puis on chauffe celle-ci, et les gaz dégagés sont extraits à l’aide de la trompe à mercure. En même temps, au moyen d’un petit tube de Geissler soudé sur l’appareil, on examine le spectre de ces gaz. Nous n’avons trouvé dans ce spectre aucune raie nouvelle. Généralement le spectre des gaz carbonés domine ; on aperçoit aussi les raies de l’hydrogène, celles de l’azote et celles de la vapeur de mercure provenant de la trompe.

Les gaz recueillis, dont le volume est petit, sont, malgré leur faible masse, violemment radioactifs. Ces gaz, agissant au travers du verre de l’éprouvette qui les contient, impressionnent en un instant une plaque photographique enveloppée de papier noir, et déchargent très rapidement les corps électrisés. Leur activité est telle qu’elle provoque la fluorescence du verre de l’éprouvette, qui est lumineux dans l’obscurité. Ce verre noircit rapidement comme lorsqu’il est exposé au rayonnement des corps les plus fortement radioactifs. L’activité du gaz activé diminue constamment, mais avec une lenteur extrême : du gaz recueilli depuis 10 jours est toujours très fortement actif.

L’air du laboratoire dans lequel nous travaillons depuis plusieurs