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SUR LE DIVORCE

En France, dit-on, la loi défendit le divorce, et les mœurs étoient cependant très corrompues ; cette expérience ne prouve pas que la loi fût mauvaise, car les nations, ainsi que les hommes, résistent suivant leur caractère aux influences d’une excellente éducation. D’ailleurs, les lois qui règlent les mœurs sont soumises à deux empires distincts : la force publique et la force de l’opinion, et toutes les deux n’ont jamais réprimé en France l’anarchie des mauvaises mœurs ; l’opinion même l’a favorisée, et les mots de foiblesse, de conquête, de victoire et de bonne fortune, montrent continuellement, par l’indulgence de la langue, celle des hommes qui la parlent ; les mœurs françoises ont été souvent en contradiction avec leurs lois ; nos lois défendoient le meurtre, nos mœurs honoroient les duels ; nos lois condamnoient le vol, nos mœurs autorisoient les dettes ; nos lois interdisoient le divorce, et nos mœurs pardonnoient l’infidélité, etc. Car l’esprit d’une nation a toujours la puissance d’expliquer, de changer et même d’intervertir l’esprit de la loi ; et les bonnes lois ne sont observées que dans les pays où la vertu est la seule mesure de l’estime.