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Benyowszky se plaignit, dès le lendemain, directement au comte de Boynes, accusant Maillart d’avoir refusé tout secours au premier détachement expédié à l’île Maroce le 3 novembre précédent et se plaignant avec aigreur des contrariétés qu’il mettait à sa mission. Maillart-Dumesle ne perdit guère plus de temps pour faire connaître à Paris le différend et dans une lettre sobrement et clairement rédigée (27 décembre 1773), il fit connaître les faits, transmit copie des lettres du baron, de ses réponses et des lettres du chevalier de Ternay qui confirmaient son exposé. La précision des griefs et la modération de la forme donnent aux lettres de Maillart un caractère de véracité et de raison que ne présentent pas celles du baron. Il est certain que ce dernier n’avait jamais eu l’occasion d’apprendre à obéir ni en Pologne, ni à bord du Saint-Pierre-et-Saint-Paul ; encore moins connaissait-il les règles inflexibles de la forme dans un État policé. Lui qui s’était cru un chef indépendant, se voyait faire la leçon par un simple comptable. Était-ce au futur conquérant de Madagascar de s’abaisser à de mesquines opérations, de minuter des rôles où il n’était question que de sacs de farine et de rouleaux de toile ? Il est vrai qu’on ne l’avait pas envoyé pour faire l’Alexandre : mais, de cela, Benyowszky ne se souvenait plus. Ainsi commencèrent assez mal les rapports entre les administrateurs et le chef de la petite troupe qui allait essayer de coloniser la Grande Ile.

À vrai dire, il est possible que l’esprit du baron ait été irrité par la connaissance qu’il eut de leur opinion défavorable à ses projets. Ils n’étaient pourtant pas hostiles en principe à l’établissement ; depuis plusieurs années, tout le monde s’en préoccupait. L’idée en était discutée, mais les avis étaient, comme toujours, partagés. Eux-mêmes avaient envoyé, pendant les mois de juillet et d’août 1773, deux petits navires explorer la côte nord-est de Madagascar, depuis la baie d’Antongil jusqu’au cap Saint-Sébastien, qui était jusqu’alors peu connue. D’après le rapport des officiers, M. de Ternay se disposait à faire au ministre des propositions