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par le Carnate en juillet. Elles annonçaient des pertes d’hommes, mais en somme rien de trop grave, et l’on pouvait sans mauvaise foi supposer dans leur pessimisme un peu de mauvaise humeur. Par contre, les lettres de Benyowszky, postérieures de trois mois, annonçaient la fondation de Louisbourg, de plusieurs autres postes, l’expédition de Mayeur jusqu’à Bombetok. On a vu ces récits plus haut. Pouvait-on soupçonner qu’il n’y eût rien de vrai dans ces rapports et qu’un homme honoré de la confiance de deux ministres fût capable de mentir avec une telle impudence ? Si l’on admet, ce qui est certain pour nous, que Sartine n’eut pas connaissance des lettres de Turgot, qu’on les lui ait ou non dissimulées, on reconnaîtra qu’il était assez naturel de faire crédit à ce Benyowszky, soutenu par des amis peut-être influents, presque illustré par son étonnante évasion, d’autant qu’on le pouvait croire en butte à de mesquines jalousies. Tel paraît avoir été le sentiment de M. de Sartine.

Il resta donc insensible à une assez rude attaque dirigée contre le baron vers ce temps. M. de Lessart, qui devait être plus tard ministre des Affaires étrangères, alors maître des requêtes du conseil, lui présenta un mémoire de l’ingénieur Cossigny sur les établissements à créer dans l’île de Madagascar. De Lessart n’avait pas d’idées personnelles sur le sujet ; aussi doit-on penser qu’il exposa celles de Cossigny et peut-être sous la forme même que celui-ci leur donnait dans la conversation. Rien n’était plus légitime que d’avertir Sartine des mauvaises chances de la nouvelle entreprise. On pouvait dire qu’elle ne réussirait pas à moins d’être combinée d’après les notions les plus exactes ; il était certain qu’on avait jusqu’alors de ce pays que des connaissances très imparfaites, mais on retrouve le style de l’insociable et jaloux Cossigny dans les lignes suivantes : « M. de Benyowszky aurait-il donc appris tout à coup ce qu’on ignore depuis si longtemps ? Peut-on se fier jusqu’à un certain point à ses relations et à ses conseils ? J’ai ouï dire qu’il était charlatan, et j’ai fortement lieu