Page:Cultru - Un empereur de Madagascar au XVIIIe siècle - Benyowszky.djvu/12

Cette page n’a pas encore été corrigée

aux Mémoires, il serait allé en Pologne pour prendre possession de l’héritage d’un oncle, dignitaire de la République. Son père étant mort sur ces entrefaites, ses beaux-frères s’emparèrent des biens qui lui revenaient et l’empêchèrent par la force de rentrer dans le manoir héréditaire. Il rassembla alors quelques-uns de ses vassaux, les arma et s’établit sur sa terre, l’épée au poing. Accusé par ses parents et alliés, traité comme un perturbateur de la paix publique, il fut condamné par la chancellerie de Vienne et forcé de fuir en Pologne. Il faut avouer que ce récit concorde bien avec ce que l’on sait de son caractère ; il paraît d’ailleurs conforme à la vérité. On comprend aisément qu’il ait passé cette aventure sous silence dans ses entretiens avec Desroches aussi bien que dans ses états de services. Ainsi s’explique sans trop de peine son entrée dans l’armée polonaise, unique ressource d’un banni. C’est alors qu’il se maria avec Mlle Henska, fille d’un noble du pays. A-t-il ensuite voyagé, comme il le raconte, en Allemagne, en Hollande, en Angleterre ? A-t-il séjourné un an à Paris ? C’est fort douteux. Il était encore à Varsovie en 1764, au moment où fut élu Stanislas-Auguste. On ne doit guère plus de créance à ses voyages qu’à ses caravanes sur les galères de Malte. « Il allait, dit-il, partir pour les Indes, lorsqu’il fut rappelé par les confédérés polonais. » Il ne se souvenait plus, quand il écrivit cela, vers 1784, d’avoir écrit autre part de sa main que de 1763 à 1767 il avait été major dans Kalicz-Cavalerie et que la discipline militaire, si facile qu’on la suppose en Pologne, ne devait pas donner aux officiers licence d’aller aux Indes. Donc, revenu à Cracovie, il fut, à l’en croire, nommé par les confédérés colonel, régimentaire général, commandant de la cavalerie et quartier-maître général. On s’étonnera de voir combler de tant d’honneurs un officier si jeune et tout à fait inconnu. Les chefs polonais, on le sait, se jalousaient, se battaient parfois entre eux, se débauchaient leurs troupes. Et ces troupes, toutes composées de cavalerie, recrutées de gentilshommes qui se réputaient tous égaux, sans discipline,