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des deux tiers le rayon d’action des navires. Alors qu’un navire marchant à 22 nœuds et ayant brûlé 1,500 tonnes de charbon a parcouru 1,800 milles, le même navire ayant brûlé 1,500 tonnes de pétrole pourra parcourir 3,000 milles.

— Quelle différence ! C’est inimaginable.

— Cela est ainsi cependant. De plus, l’absence de cette fumée noire révélatrice causée par le charbon, comporte des avantages si évidents qu’il n’est même pas nécessaire de les développer. Or, l’Angleterre, si riche en charbon, n’a trouvé d’huile minérale ni chez elle, ni dans ses colonies. Elle est donc obligée de s’approvisionner du nouveau combustible à l’étranger.

— Les États-Unis, voisins immédiats du Mexique, veulent-ils donc s’opposer à cette main-mise de l’Angleterre ?

— Non. Mais vous savez comme tout Européen que les Nippons et les Américains s’observent et se guettent des deux côtés du Pacifique Or, le Japon est l’allié de l’Angleterre, et parmi les navires de guerre destinés à protéger les étrangers, il y avait un croiseur japonais. Cette circonstance n’a pas passé inaperçue chez nous et le gouvernement de Washington entend veiller et ne veut se laisser devancer par personne. Donc une intervention s’impose, et si actuellement on hésite encore, on ne temporisera plus longtemps.

— Me conseillez-vous de télégraphier dès à présent ?

— Attendez. Je vous promets de vous prévenir la veille du jour où l’intervention sera effective.

— Mais comment saurez-vous ?

— Vous me demandez la communication d’un secret d’État…

— Ah ! pardon.

— Ne vous excusez pas, ce secret est celui de Polichinelle, et la présence des troupes, que vous avez rencontrées dans les rues, les navires que vous avez vu stationner dans le port, ont dû vous mettre déjà au courant. Je puis vous dire que le gouvernement voulant empêcher tout coup de Bourse — trop brusque — étale ses projets au grand jour. On interviendra sûrement.

— Et vous dites que vous le saurez la veille ?

— On ne peut même pas intervenir sans que je le sache.

— Vraiment ?

— À partir de maintenant, je vous demanderai le secret, le secret le plus absolu. Je ne crains pas les indiscrétions diplomatiques, mais je redoute les voleurs !

Et tout en parlant, Georges Weld allait ouvrir la porte, poussée seulement, de la chambre-forte située au fond de son bureau.

Marius put voir alors un coffre-fort modèle !

La porte, en un métal défiant les lampes à oxygène et acétylène, était épaisse de trente centimètres ; peut-être pesait-elle 10,000 kilos. Aux multiples verrous intérieurs dont elle était garnie et que la clef faisait jouer, s’ajoutait une grille qui se fermait automatiquement, en même temps que la porte, si elle n’était fermée déjà.

Quant à la chambre à laquelle cette porte donnait accès, elle était blindée avec des plaques de ce même métal, épaisses de 15 centimètres, réunies les unes aux autres par des tés intérieurs et extérieurs et des boulons en acier. Cette chambre, prise entièrement dans une maçonnerie, avait à peu près deux mètres de profondeur sur un mètre cinquante centimètres de largeur.