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térieure, et pourtant les événements qui ensanglantaient la république mexicaine ne pouvaient laisser indifférente sa puissante voisine, gardienne des personnes et des intérêts américains, car, chose à considérer, il y a au Mexique plus de cent mille Américains du Nord, dont les capitaux représentent plus d’un milliard.

D’autre part, une guerre contre le Mexique devait exiger un effort militaire considérable, effort au-dessus des moyens dont pouvait disposer à cette époque la grande Fédération américaine.

Et pourtant la guerre civile qui règne en maîtresse au Mexique est l’une des pages les plus horribles au livre d’histoire de l’humanité.

C’est une succession de drames effarants, d’assassinats sans excuse, d’émeutes, de compétitions militaires, un mélange ignoble de boue et de sang.

Le 18 février 1913, Francisco Madero, sommé de démissionner, abat de deux coups de revolver le lieutenant-colonel Jimenez Riveroll et le major Isquierdo. Madero est arrêté avec ses ministres, et le général Huerta, chef du mouvement révolutionnaire, à qui l’on demande ce qu’il convient d’en faire, prononce cette phrase terrible :

— Fouga en escabeche ! (Mettez-les à mariner).

Le 23, à minuit, Madero est assassiné dans sa cellule pendant son sommeil, jeté dans une automobile, et c’est sur une route déserte l’ignoble comédie d’un guet-apens dont le lendemain le récit officiel sera transmis en détail !

Gustave Madero, frère du président, a été tué, lui aussi, en sortant du restaurant où il soupait avec Huerta !

Cependant que de véritables bandits comme Zapata, mettent les provinces à feu et à sang, on se fusille dans les rues des grandes villes. Le président Huerta voit se tourner contre lui ses soldats et on pourrait croire à une guerre d’opérette, si les tueries n’étaient pas effroyables.

Les généraux (?) Venustiano Caranza, Pancho Villa, Maximo Castillo, Orosco, Blanquet, tantôt ennemis, tantôt alliés, président ou organisent les massacres, et cette anarchie générale pouvait à bon droit émouvoir le gouvernement de Washington.

Quand Marius arriva à Brownsville, l’intervention américaine paraissait imminente, mais cependant rien n’était irrémédiablement décidé.

Il n’avait donc qu’à attendre les événements, du côté politique, et à remplir avec zèle la mission policière dont il était chargé.

Sa rencontre et son amitié avec Stockton avaient de beaucoup facilité les choses pendant les derniers jours de la traversée, il s’était intimement lié avec le détective, et grâce aux conversations qu’ils avaient eu ensemble, les éléments du fameux rapport étaient déjà réunis en partie.

La première chose à faire, aussitôt le débarquement, était d’aller à la banque G.-B. Weld, pour savoir si quelqu’un les devançant, s’était présenté à ses guichets avec la lettre de crédit volée.

Sur le quai de Brownsville, Ketty s’était jetée dans les bras d’une dame d’âge respectable, mais d’une mise un peu ridicule, arborant une toilette où abondaient les couleurs claires : sa mère, mistress Trubblett, autrefois « Bianca Trubblett », alors qu’elle avait, sur le continent, fait partie de la troupe des « Sisters Farrison », de troublante mémoire !

Marius lui fut présentè : « mon fiancé ». Il fut admis à l’honneur d’être reçu chez sa future belle-mère et invité à y venir « à son idée ».