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mon homme, prévenu, ne m’aurait pas donné barre sur lui. C’est un malin. Voilà trois ans que j’essaye de le pincer en flagrant délit et qu’il m’échappe. Et cependant il n’est pas sûr que ce soit moi qui le poursuis avec cette ténacité, voici seulement la première fois qu’il me voit à visage découvert. Enfin, c’est partie perdue.

— Je n’en reviens pas. Tout semblait cependant vous accuser !

Semblait, il faut se méfier des déductions et ne pas trop croire aux miracles accomplis par les Sherlock Holmes ou autres Lecocq, monsieur Boulard. Il n’y a qu’une chose qui compte : les faits. Rien que les faits ! Mais je m’aperçois que je vais vous faire un cours à l’usage du parfait policier et que je ne m’arrête pas de parler ; excusez-moi, je ne recommencerai plus.

Et avec son même sourire, son calme imperturbable, Stockton répara le désordre de ses affaires, ouvrit la porte et remettant sa malle à Perrot, le marin :

— Portez cette malle dans ma cabine, mon ami, ces messieurs n’en ont plus besoin !

— Avec tout cela, reprit Marius, ce Borchère a peut-être pris ma lettre de crédit.

— Une lettre de crédit ?

— Une lettre de crédit sur la banque G.-B. Weld, de Brownsville.

— Elle a été volée ?

— Je ne sais pas encore, elle se trouvait dans une de mes malles dans la cale des bagages.

— Eh bien, il est facile de nous assurer du fait.

Marius et Stockton descendirent à la cale. Le préposé aux bagages n’avait pas vu monsieur de Borchère, mais ni lui ni personne ne gardait les malles. La porte qui conduisait à la cale était alors soigneusement cadenassée et nul ne pouvait y pénétrer.

Marius ne s’arrêta pas à ces explications. Il n’eut de cesse avant d’avoir visité ses malles. Celles-ci avaient été fouillées, la lettre de crédit, ainsi que quelques papiers d’identité, avaient disparu.

Déjà Marius se voyait dépouillé ! Stockton le rassura.

— Nous allons télégraphier de Lisbonne à Brownsville, à la banque Weld, que vous avez été volé et que si quelqu’un se présente sous votre nom, on l’arrête.

— Mais n’arriverons-nous pas avant notre voleur ? Par quelle voie pourrait-il nous précéder ?

— Peut-être par New-York et l’Atlantic-Pacific Railroad, est-il possible de gagner un jour ou deux sur nous, mais la banque, prévenue, ne paiera pas. Allons demander au capitaine un canot pour aller à Lisbonne, il ne peut pas nous refuser cela.

Le capitaine fit mettre un canot à la mer.

— Vous donnerez ordre au canot de la malle-poste de revenir en même temps que vous. Mais ne prenez, je vous prie, que le temps d’aller et venir, car nous devons repartir dans quatre heures ! Au fait, si vous vous trompiez, et si Borchère allait revenir ?

— Soyez sans crainte à cet égard. Du reste, traitez-le s’il revenait comme vous aviez dessein de me traiter moi-même.

Et Stockton sauta dans le canot.

Arrivés à Lisbonne, Marius et lui passèrent tout d’abord au bureau du télégraphe, puis au bureau central de la police pour y donner, à tout hasard, le signalement du comte.

Comme ils revenaient vers le port, Marius demanda à son ami — car maintenant Stockton était son ami —