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HÉRODIEN

sans doute, puisqu’il exclut beaucoup de choses des plus intéressantes, mais qui semble avoir été voulu par l’auteur. Quant à la sincérité dont il fait profession avec quelque emphase dans sa préface, elle paraît réelle[1]. Hérodien a eu sans doute ses préjugés, il a pu se tromper dans certaines appréciations, mais il semble avoir recherché loyalement la vérité. Il mentionne souvent ceux qui ont écrit sur les choses de son temps, quoique, en général, sans les nommer. Il a dû les lire ; mais son information, ordinairement, paraît reposer plutôt sur des souvenirs, sur des notes prises au jour le jour, sur ce qu’il a vu ou entendu dire. Elle est intéressante, sans être ni très curieuse des détails, ni même toujours assez précise. Peu de chronologie, sauf les grandes indications, peu de géographie, aucune connaissance des choses militaires. Ce qui paraît l’attirer le plus et ce qu’il note le mieux, bien qu’à grands traits encore, c’est le côté moral de l’histoire, le caractère des empereurs et de leurs conseillers, les influences qu’ils ont subies, les mouvements de l’opinion. Imitateur de Thucydide, de même que Dion, mais avec une méthode plus consciente, il a emprunté à son modèle cette conception psychologique de son rôle. Son plus grand tort est de ne pas savoir se défendre assez de la rhétorique. Bien qu’il ait de la réflexion, ses trop nombreuses harangues sont fâcheuses par l’abus des souvenirs classiques ; elles le seraient bien plus encore, s’il n’avait heureusement visé à la concision. Ses récits ont beaucoup plus de mérite. Hérodien ne manque ni d’imagination ni d’art ; et c’est par là qu’il l’emporte sur Dion ; il sait composer une scène, détacher un personnage, donner aux moments dramatiques leur valeur et leur effet. Si sa langue n’est

  1. Capitol. Clod. Albin., 12, 14 : Quæ qui diligentius scire velit, legat Marium Maximum de latinis scriptoribus, de græcis Herodianum, qui ad fidem pleraque dixerunt.