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CHAP. VI. — DE SEPTIME SÉVÈRE À DIOCLÉTIEN

Mais, il faut bien le dire, ce sont justement ces qualités qui accusent la faiblesse constitutive de l’œuvre et, par suite, le vice du temps. L’imitation, le convenu, les habitudes de l’école ont étouffé chez Héliodore une originalité qui peut-être, en un autre siècle, aurait pu se développer. Sans cesse, il se souvient, au lieu d’observer, et il copie, au lieu de créer. Son roman est plein de réminiscences d’Homère et des tragiques ; il est plein aussi des lieux communs de la sophistique. Rien n’y est traité avec le goût simple de la vérité. Une fausse élégance, une fausse poésie, un faux idéalisme, une fausse sensibilité, voilà ce qui enveloppe tout. Et le style lui-même a ce caractère, de manquer profondément de sincérité ; il est, pour ainsi dire, entre la poésie et la prose, artificiellement fabriqué avec des souvenirs, avec des éléments épiques et des éléments attiques, auxquels se mêlent, çà et là, des solécismes et des barbarismes, dus sans doute à l’origine syrienne de l’auteur.


Après Héliodore, l’histoire du roman grec se continue pour nous, — faute sans doute de beaucoup d’œuvres disparues, — par les récits d’Achille Tatios et de Chariton de Lampsaque[1]. Le temps où ils ont vécu l’un et l’autre ne peut plus être surement déterminé ; mais on incline à les rapprocher plutôt du ve siècle que du iiie. Comme d’ailleurs le roman, entre leurs mains, peut passer pour le prélude du roman byzantin, nous réservons l’étude très sommaire de leurs œuvres pour le chapitre ou nous jetterons un coup d’œil sur la dernière époque de l’hellénisme. — Au contraire, la pastorale de Longus, bien que nous n’en connaissions pas mieux la date, procède d’un effort de création qui la rappro-

  1. Suidas (Ξενοφῶν) cite en outre deux romanciers du nom de Xénophon, l’un d’Antioche, l’autre de Chypre, dont nous ne savons d’ailleurs rien.