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LEXICOGRAPHIE : LES ATTICISTES

la langue du droit, beaucoup d’autres n’étaient plus de ceux dont on se servait ordinairement au second siècle : il fallait donc qu’ils fussent recueillis et expliqués. D’autre part, certains maîtres en renom, vrais artistes de discours, se piquaient de n’employer que des mots de pure tradition classique ; ils prétendaient parler attique comme Démosthène ou Platon ; et, comme ils faisaient la mode, il ne manquait pas de gens pour les imiter. À ceux-là, il fallait des dictionnaires qui leur permissent de savoir ce qui était attique et ce qui ne l’était pas[1]. Il y avait donc deux tendances, originairement distinctes, l’une savante, visant à la connaissance des choses, l’autre artistique, visant à l’imitation d’un certain langage, qui favorisaient également la lexicographie et l’invitaient à se tourner vers l’atticisme. De ces deux tendances, c’est tantôt l’une, tantôt l’autre, qui prévaut chez les lexicographes du temps, sans qu’il soit toujours possible d’en faire exactement la distinction. Mais, d’une manière générale, la seconde semble l’emporter ; leur but à presque tous, c’est de contribuer à restaurer artificiellement dans l’éloquence une langue tombée en désuétude.

Cette tendance apparaissait déjà chez quelques grammairiens du ier siècle. On pourrait, si c’en était ici le lieu, la suivre comme à la trace chez divers auteurs oubliés, tels que Dorothée d’Ascalon[2], Épithersès de Nicée, Nicandre de Thyatire[3], Irénée surtout[4]. Celui-ci, dès la fin du ier siècle, donnait déjà une attention toute particulière à la langue attique, ainsi qu’en témoi-

  1. E. Meyer, De lexicis rhetoricis, Opusc. Acad. II.
  2. Photius, cod. 156 ; Athénée, VII, p. 239 et XIV, p. 662. Ét. de Byz., v. Ἀσκάλων. Cf. Eust. ad Iliad. 23, 230 ; Schol. Hom. Il. X, 352 ; Athén. IX, p. 409 et XI, p. 481 D. Cf. C. Müller, Scriptor. Alex. Magni, p. 155, dans l’Arrien de Didot.
  3. Ét. de Byzance, Νίκαια, et Θυάτειρα. Athén., XV, p. 678. Harpocration, v. Μέδιμνος, Τριπτῆρα, Θυργωνίδαι.
  4. Suidas, Εἰρηναῖος et Πακᾶτος.