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THÉOPHRASTE.

Nous nous arrêterons de préférence à ceux qui viennent de ses ouvrages sur la rhétorique et la morale, ou qui ont une valeur littéraire par la finesse de la pensée et du tour. Voici, par exemple, deux définitions spirituelles de l’amour :

L’amour est la passion d’une âme désœuvrée[1].

L’amour est l’excès d’un désir irraisonnable, prompt à venir, lent à s’en aller[2].

Il disait aussi que « trop d’amour engendre la haine[3] ».

Aux femmes, il recommandait avant tout la modestie : il disait qu’une femme « ne doit ni voir ni être vue, surtout quand elle est experte aux artifices de la beauté ; car cette science n’a jamais qu’une fin mauvaise[4] ; » — et que « le domaine réservés l’habileté des femmes, ce ne sont pas les choses de la cité, mais celles de la maison[5]. »

C’est à lui encore qu’appartient cette belle pensée :

Respecte-toi toi-même pour ne pas rougir devant les autres.

D’autres mots sont simplement amusants, comme celui où il appelle si justement les boutiques de barbiers de son temps, grands rendez-vous des causeurs et des nouvellistes, des « banquets sans vin[6] ».

Mais quelques-unes de ses pensées les plus fines sont de celles qui se rapportent à l’art d’écrire. En voici une, où il exprime cette idée que le « secret d’ennuyer est

    de Wimmer (XII de Diels), sur l’éternité du monde, serait de ceux-là, si l’authenticité en était plus certaine. Cf. Zeller, Hermes, XI, p. 422 et suiv., et Diels, p. 106 et suiv.

  1. Fragm. CXIV (πάθος ψυχῆς σχολαζούσης).
  2. Fragm. CXV
  3. Fragm. LXVI.
  4. Fragm. CLVII.
  5. Fragm. CLVIII.
  6. Fragm. LXVI.