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PLUTARQUE ; LES VIES PARALLÈLES

d’écrire lui aussi des biographies, il ne lui vint donc pas à l’esprit qu’il eût à créer quelque chose de nouveau. L’histoire l’attirait, parce qu’il était curieux, parce qu’il se plaisait à raconter ; d’autre part, les œuvres de peu d’étendue convenaient mieux à son humeur que les longues compositions ; il choisit probablement la biographie comme la forme la plus courte de l’histoire. Mais, comme il arrive aux hommes de mérite, en s’appropriant cette forme, il la marqua de sa personnalité ; et, bientôt, il acquit le sentiment de ce qu’elle avait pris d’original entre ses mains. Ce lui fut une raison de plus de s’y attacher. Elle le charmait par elle-même, et elle lui procurait le plaisir de se sentir en quelque mesure créateur.

Nous possédons encore cinquante des biographies qu’il composa ainsi ; et nous savons qu’il en avait écrit d’autres[1]. Quarante-six sont accouplées deux à deux[2] et forment la collection des Vies parallèles ; les quatre autres, à savoir celles d’Aratos, d’Artaxercès, d’Othon et de Galba, sont isolées. D’une manière générale, les Vies parallèles, dédiées toutes à Sossius Sénécion, semblent avoir été rédigées par Plutarque sans interruption notable, dans la dernière partie de sa vie[3]. Elles appartiennent par conséquent à la même période que la plupart de ses œuvres morales, et elles dénotent en effet les mêmes préoccupations[4]. Il paraît probable à priori que les vies isolées

  1. Biographies perdues de Léonidas, d’Épaminondas, de Métellus, des deux Scipions, d’Hercule.
  2. Sauf un groupe de quatre, comprenant les biographies d’Agis et de Cléomène, mises en parallèle avec celles de Tibérius et de Caïus Gracchus.
  3. Démosth., ch. ii. Il résulte de ce passage qu’il était âgé lorsqu’il écrivait cette biographie, qui faisait partie du 5e couple.
  4. Renvois des biographies aux Moralia : Camille, 49 ; Périclès, 6, 39 ; Dion, 2 ; Lysandre, 42 ; Sylla, 11 ; Brutus, 25 ; Romulus, 15. Tous ces renvois, sauf le dernier qui vise les Αἰτία, sont conçus en termes vagues, mais ils prouvent au moins que Plutarque ne s’ab-