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THÉOCRITE : LES SYRACUSAINES

entre l’épopée et l’élégie : c’est plutôt une élégie épique qu’une épopée. Elle est d’ailleurs gracieuse. — Il en est à peu près de même de la vingt-sixième, les Bacchantes, où Théocrite raconte avec une élégance un peu brève la mort de Penthée déchiré par sa mère Autonoé. Les derniers vers de la pièce, remplis de réflexions religieuses sur le respect dû à Dionysos, la rapprocheraient plutôt d’un hymne. Elle fut peut-être composée pour quelque fête célébrée par Ptolémée. — L’Idylle des Dioscures (XXII) présente un caractère encore plus singulier : c’est bien un récit épique consacré à la gloire de Castor et de Pollux ; mais la première partie, relative à la lutte de Pollux contre le géant Amycos, contient une partie dialoguée qui fait songer à une sorte de mime épique. L’appel aux rois divins, vers la fin du poème, semble indiquer que Théocrite était alors à la cour du roi d’Égypte et qu’il sollicite discrètement ses largesses. Les deux récits du combat de Pollux contre Amycos et du combat de Castor contre Lyncée sont vivants et pittoresques ; les discours échangés ont tantôt une précision spirituelle et tantôt une élégance agréable. Quelques traits de bel-esprit s’y mêlent. En somme, l’œuvre est d’un art franchement alexandrin et ne révèle pas, malgré ses mérites, le poète supérieur des belles idylles rustiques. — Héraclès tueur du lion (XXV) est plus semblable à un fragment d’épopée proprement dite. C’est l’histoire d’Héraclès arrivant le soir chez Augias, domptant un taureau dangereux, et racontant à ses hôtes sa victoire sur le lion de Némée. Le récit est d’une ampleur facile et harmonieuse. Ce qu’il renferme peut-être de plus caractéristique, c’est d’abord la très belle description du retour des troupeaux d’Augias, innombrables comme les nuées chassées par les vents[1], morceau digne

  1. XXV, 85-99.