Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t5.djvu/201

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
183
THÉOCRITE

ces que des Bucoliques ; mais, si l’on peut, avec certitude ou avec vraisemblance, reconnaitre dans ces pièces diverses quelques débris des huit ou dix recueils signalés par Suidas, il n’en est pas moins vrai que ce sont là de simples débris, des échantillons épars ; le reste est perdu, et de telle sorte que nous ne pouvons en dire quoi que ce soit. Ce qui nous reste comprend, outre quelques morceaux insignifiants, trente « idylles » et à peu près le même nombre d’épigrammes. J’appelle morceaux insignifiants : 1o un fragment très court d’un poème intitulé Bérénice ; 2o une sorte de chanson Sur la mort d’Adonis, très plate, et de basse époque évidemment ; 3o enfin la Syrinx, simple jeu d’esprit sans intérêt[1]. Parmi les épigrammes, il y a un choix à faire : quelques-unes sont manifestement apocryphes, d’autres probablement ; nous y reviendrons. Quant aux Idylles, il faut d’abord remarquer que ce nom, devenu si célèbre, ne figure pas dans l’énumération de Suidas et qu’il ne remonte pas à Théocrite ; il signifie simplement, dans la langue des érudits alexandrins, « petites pièces », et il appartient sans aucun doute au grammairien qui forma le premier recueil de « petites pièces », de pièces détachées ou « pièces choisies » (ἐκλογαί) de Théocrite. Comme les pièces « bucoliques » dominaient dans ce recueil et y tenaient la première place, les mots « idylle » et « églogue » ont dû à cette circonstance l’acception particulière et limitée qu’ils ont gardée chez les modernes[2]. Nous ne savons pas exactement l’histoire des

  1. Cf. plus haut, p. 461, n. 1.
  2. L’étymologie de ἐκλογή saute aux yeux. Quant à εἰδύλλιον, c’est le diminutif de εἶδος, qui, dans la langue de l’érudition ancienne, désigne une pièce de poésie : les odes de Pindare sont souvent appelées de ce nom par les scholiastes, On voit donc que jamais Théocrite n’a songé à exprimer par le choix de ce titre cette idée qu’il composait de « petits tableaux », comme on le répète sans cesse.