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vers l’étude des événements auxquels il ne lui était plus permis de prendre part, et il composa son histoire. Marcellin rapporte qu’il vécut pendant ces vingt années en Thrace, à Scapté-Hylé[1]. Ses relations antérieures avec la Thrace rendent cette assertion vraisemblable. L’historien Timée, au témoignage du même biographe, disait que Thucydide avait vécu en Italie, ce que Marcellin nie énergiquement. La vérité est que Thucydide, s’il adopta Scapté-Hylé pour sa résidence principale, n’y resta pourtant pas toujours ; car lui-même nous avertit que, grâce à son exil, il put voir de près les événements, et en particulier les actes accomplis par les Péloponésiens ; d’où l’on peut conclure qu’il fit de nombreux voyages. Il semble notamment connaître si bien les environs de Syracuse qu’il est malaisé de croire qu’il n’y soit point allé ; or un voyage en Sicile était à peu près inséparable d’un voyage en Italie, ce qui justifierait en partie le dire de Timée[2].

Les dernières circonstances de sa vie, son retour de l’exil, puis sa mort, sont enveloppées de quelques obscurités.

Thucydide nous dit lui-même, dans le passage relatif à son exil, qu’il resta vingt ans hors d’Athènes. Les événements d’Amphipolis s’étant produits au début de l’hiver de l’année 424-423, il résulte de là qu’il fut

  1. Marcellin, 25 et 47. Le biographe parle d’un platane de Scapté-Hylé sous lequel Thucydide écrivit son livre ; c’était probablement là une de ces reliques chères aux cicerones de tous les temps et dont la valeur historique est moins médiocre. Je ne parle pas d’un prétendu séjour de Thucydide à la cour d’Archélaos, donc on a cru récemment trouver la preuve dans Marcellin, 29-31. La phrase de Marcellin est fort obscure, et probablement altérée. On en peut tirer tout ce qu’on veut. Voyez sur ce point l’excellente discussion de M. J. Girard (Essai sur Thucydide, 2e édit., p. v-xi).
  2. Thucydide, V, 26, 5 (γενομένῳ παρ’ ἀμφατέροις τοῖς πράγμασι, καὶ οὐχ ἦσσον τοῖς Πελόποννησίων διὰ τὴν φυγήν).