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nom[1]. C’est évidemment en souvenir de ce personnage que le père de Thucydide s’appelait ainsi, car il y avait des liens de parenté entre l’historien et Cimon fils de Miltiade. Les témoignages à cet égard sont unanimes, et la tombe de Thucydide se voyait encore, au temps de Plutarque, parmi celles de la famille de Cimon[2]. L’existence de cette parenté n’est donc pas douteuse, mais on n’en sait pas au juste le degré[3]. L’historien Hermippos (IIIe siècle avant J.-C.) rattachait en outre Thucydide à la famille des Pisistratides[4], sans qu’on sache sur quelles preuves. Ce qui est certain, c’est que Thucydide, par ses liens de famille avec Cimon, se trouvait en relations étroites (quoique probablement indirectes) avec la plus illustre noblesse d’Athènes : les ancêtres de Miltiade se prétendaient issus d’Éaque, et par conséquent de Zeus[5]. Il dut certainement aussi à sa naissance l’avantage de posséder une grande fortune : il rapporte lui-même qu’il exploitait en Thrace (probablement comme fermier de l’État) les mines d’or de Scapté Hylé, et que cela lui assurait dans la région voisine une influence considérable[6]. Cette fortune lui donna l’indépendance nécessaire à ses travaux et lui rendit plus faciles les voyages dispendieux exigés par la préparation de son ouvrage.

Comme tous les jeunes Athéniens, Thucydide lut d’abord Homère, dont les poèmes formaient alors le fond de la culture athénienne. On voit assez, par son

  1. Hérodote, VI, 39.
  2. Plutarque, Cimon, 4, 2. Cf. Pausauias, I, 23, 14, et Marcellin, 14.
  3. Voir, sur ce point, ma Notice sur Thucydide, précédemment citée, et à laquelle je demande la permission de faire plus d’un renvoi.
  4. Cf Marcellin, 18.
  5. On peut voir cette généalogie dans Marcellin.
  6. Thucydide, IV, 105, 1. Ces mines étaient probablement devenues propriété athénienne à la suite de la conquête de Thasos par Cimon (464), et le droit de les exploiter était sans doute un privilège que l’historien devait à sa parenté avec le vainqueur de Thasos.