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— Quant au Πολιτικός, c’était une sorte de traité de morale, mais de morale subordonnée à la préoccupation de la vie sociale, selon l’ancienne tendance grecque[1] : l’auteur y cherchait sans doute à déterminer les qualités publiques et privées du citoyen digne de ce nom. — Les fragments expressément donnés par les anciens comme appartenant à l’un ou à l’autre de ces deux ouvrages sont courts ; mais Stobée en donne quelques autres, beaucoup plus longs, beaucoup plus intéressants, et qu’on peut, avec vraisemblance, rattacher pour la plupart au Περὶ ὁμονοίας[2].

La question à résoudre est celle-ci : ces fragments, cités sous le nom d’Antiphon, sans autre désignation, doivent-ils être attribués à l’orateur, ou à quelqu’un des cinq ou six Antiphon qui ont vécu à la même époque[3] ? Le problème avait été posé dès l’antiquité. Didyme, au témoignage d’Hermogene[4], les attribuait tous à un homonyme de l’orateur, qu’aurait fait, avec le métier de sophiste, celui de devin et d’interprète des songes. Mais l’opinion de Didyme, autant qu’on en peut juger par le passage d’Hermogène, n’était qu’une conjecture personnelle, fondée sur le style de ces fragments. Les critiques modernes hésitent. Le Περὶ ἀληθείας est attribué par tout le monde au sophiste ; quant aux ouvrages moraux, les uns les donnent au sophistes[5], les autres à l’orateur[6]. En fait, il n’y a aucune raison décisive de ne pas les attribuer à l’orateur. On parle de diffé-

  1. Cf. le Πολιτικός attribué à Héraclite.
  2. Les Fragments d’Antiphon Le Sophiste, p. 152. Voir le texte de ces fragments dans l’Antiphon de Blass, p. 139 et suiv.
  3. Sur ces divers Antiphon, cf. Blass, Attische Beredsamkeit, I, p. 82, note.
  4. Hermogène, Formes du style, II, 7 (Walz, t. III, p. 385 et suiv.)
  5. Sauppe, De Antiphonte sophista ; Blass, Attische Bered., I, p. 97 et suiv.
  6. Spenger, Ξυναγωγὴ τεχνῶν, p. 114 ; G. Perrot, Éloquence polit. et judic. à Athènes, p. 137 et suiv.