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On signale deux ou trois passages ou l’orateur, au lieu des redoublements de mots si ordinaires chez Antiphon, accumule jusqu’à trois synonymes, et cela plusieurs fois de suite. Si tout le reste du discours porte la marque de l’orateur, que prouve ce détail, qui peut être ou une exception sans conséquence, ou la marque d’une période un peu différente de sa vie ?

Arrivons enfin à la question d’Antiphon le Sophiste[1]. Les anciens citent, sous le nom d’Antiphon, trois ouvrages assez importants : un traité De la Vérité (Περὶ ἀληθείας), en deux livres, et deux discours moraux intitulés : De la Concorde (Περὶ ὁμοωοίας) et le Politique (Πολιτικός)[2]. — Du traité De la Vérité il nous reste une trentaine de courts fragments. C’était toute une philosophie, comme les traités Περὶ φύσεως ; des anciens philosophes, comme le Ἀλήθεια de Protagoras. Le premier livre était consacré aux questions générales de métaphysique étude méthode ; le second a l’explication particulière des différents phénomènes naturels. Une des choses les plus certaines qui ressortent des fragments, c’est que celui qui les a écrits était un esprit précis, subtil et déjà fort habile à analyser les idées abstraites. — Le sujet du Περὶ ὁμοωοίας ; peut se résumer ainsi : la vie humaine est courte et la plupart des hommes l’emploient mal ; ne la perdons pas comme à plaisir par de vaines inimitiés. Il est en outre probable que, pour établir son principe, à savoir la misère de la condition humaine, l’auteur passait en revue les différents âges.

  1. J’ai traité cette question dans l’Annuaire des Études grecques, 1883, sous ce titre : Les Fragments d’Antiphon le Sophiste. Pour le détail des faits, je renvoie à ce travail ; pour l’ensemble des conclusions, j’incline aujourd’hui dans un sens un peu différent ; je crois moins à Antiphon le Sophiste.
  2. Je ne mentionne pas divers ouvrages sur l’agriculture et les songes, qui n’ont jamais été attribués à Antiphon l’orateur. Cf. Blass, dans son édition d’Antiphon (Teuhner), note à la suite des fragments, p. 159.