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Prodicos, né à Céos, dans la petite ville d’lulis[1], était plus jeune que Protagoras[2], mais peut-être un peu plus âgé que Socrate, qui l’appelle ironiquement son maître, à plusieurs reprises[3]. Il vint souvent à Athènes en ambassade[4]. Il y acquit une réputation considérable et y gagna beaucoup d’argent[5]. On ne sait rien sur la date ni sur les circonstances de sa mort, sinon qu’elle doit être postérieure au procès de Socrate[6].

Cicéron le range, avec Protagoras, parmi ceux qui ont étudié les questions relatives à la nature des choses[7]. Mais c’est surtout comme professeur de morale et comme professeur de style qu’il est connu.

En morale, il prêchait la morale courante avec un rare succès. Aristophane le ménage et l’estime[8]. Platon dit que ses disciples l’auraient volontiers porté en triomphe pour son enseignement des vertus politiques et domestiques[9]. Xénophon lui fait un emprunt considérable dans un ouvrage consacré surtout cependant à la gloire de Socrate[10]. Enfin Socrate lui-même ne méprisait pas sa morale. Non qu’il la jugeât vraiment philosophique, bien entendu ; mais il la croyait pratiquement

  1. Suidas. Cf. Platon, Protag., p. 339, E. Sur Prodicos, voir Weicker, Prodikos von Keos Vorgünger des Sokrates, dans ses Kleine Schriften, II, 393-541. — Zeller, t. II, p. 469 (trad. française).
  2. Il est un de ceux dont celui-ci, dans le Protagoras de Platon, dit qu’il pourrait être le père (p. 317, C).
  3. Ménon, p. 96, D ; Cratyle, p. 384, B ; etc.
  4. Hippias maj., p. 282, C.
  5. Apol., p. 19, E ; Xénophon, Banquet, 1, 5 ; 4, 62. Sur le prix de ses leçons, cf Platon, Cratyle, p. 384, B, et Aristote, Rhét., III, 14, p. 1415, B, 15-17.
  6. Apol. p. 19, E. Suidas raconce qu’il fut condamné à boire la ciguë comme Socrate. Welcker (p. 503) a démontré que c’était une erreur. — Sur la santé délicate et la grosse voix de Prodicas, cf. Protagoras, p. 315, D.
  7. De orat., III, 128. Cicéron a-t-il ici en vue le livre Περὶ φύσεως ἀνθρώπον, cité par Gallien (II, p. 130, K) ?
  8. Nuées, 360 sqq.
  9. Républ., X, p. 600, c.
  10. Le mythe d’Héraclès entre le Vice et la Vertu, dans les Mémorables, II, 1, 21.