Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t4.djvu/215

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mais aussi de la définir, c’est-à-dire de marquer dans chaque chose ce qui fait qu’elle tient à un groupe de choses analogues, et ce qui rattache ce groupe à un autre groupe supérieur et plus étendu. En langage scolastique, il s’agit de déterminer son genre prochain et sa différence propre. Cette différence propre, d’ailleurs, n’est pas un caractère individuel ; il n’y a pas de science de l’individu ; c’est un caractère général encore, mais le moins général possible, celui qui détermine l’espèce, moins étendue que le genre[1]. — Quand on veut définir, par conséquent, on rassemble sous le regard de la raison les objets qu’on juge analogues ; on les compare pour en dégager le trait commun ; on les ramène ainsi à l’unité, soit d’abord là celle de l’espèce, soit plutôt à celle du genre, qu’on détermine ensuite et qu’on restreint à son tour par l’introduction ultérieure de l’idée d’espèce. La définition est alors complète. Il ne reste plus qu’à la vérifier en la comparant de nouveau aux objets particuliers, pour s’assurer qu’elle les comprend tous et ne comprend qu’eux.

La science des définitions n’est d’ailleurs qu’une partie de la science. À côté des choses prises en elles-mêmes, qu’on définit, il y a l’enchaînement des faits, sur lesquels on raisonne. Socrate avait aussi sa théorie du raisonnement. Il avait remarqué que, dans la pratique de la vie, les erreurs viennent surtout de ce qu’on ne sait pas rattacher une circonstance donnée à la loi plus générale dont elle n’est qu’une application particulière. Découvrir cette loi, voilà le remède. Pour y réussir, il faut faire à peu près comme dans la recherche des définitions ; il faut commencer par rassembler des faits analogues, les comparer, en dégager les rapports

  1. Mémor., IV, 5, 12 : Ἔφη δὲ καὶ διαλέγεσθαι ὁνομασθῆναι ἐκ τοῦ συνιόντας κοινῇ βοθλεὐεσθαι διαλέγοντας κατὰ γένη τὰ πραγματα. — La définition s’appelle en grec ὀρισμὀς.