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à propos de son influence sur les progrès de l’éloquence attique.

Ce qu’était, au point de vue oratoire, l’Athènes du VIe siècle (celle de Solon ou de Pisistrate), nous l’ignorons, et nous n’avons pas à le rechercher : c’est l’Athènes du Ve siècle, la grande cité démocratique, organisée par les réformes de Clisthène d’abord, ensuite par celles de Périclès, qui doit nous occuper. Il s’agit de voir quelles occasions elle offrait à la parole, quelles obligations ou quelles facilités les circonstances imposaient aux orateurs, quel public enfin ils devaient satisfaire et ce que les goûts de ce public donnaient de soutien à l’éloquence.

§2

Les occasions de parler étaient nombreuses et variées. On parlait au Pnyx, devant les tribunaux, dans certaines cérémonies. D’où les trois genres distingués par la rhétorique ancienne, le délibératif, le judiciaire, l’apodictique (ou genre d’apparat[1]).

On sait le mot de Fénelon : « À Athènes, tout dépendait du peuple, et le peuple dépendait de la parole. » Cette appréciation est vraie à la lettre. La cité était gouvernée par deux assemblées, le Conseil des Cinq Cents et l’Ecclesia. De la première, rien d’essentiel à dire pour le sujet qui nous occupe : oratoirement, elle pâlissait auprès de la seconde. Mais celle-ci était pour les orateurs une arène incomparable. Quatre fois au moins par prytanie (c’est-à-dire dans un espace de trente-cinq ou trente-six jours), beaucoup plus souvent si les affaires l’exigeaient (ce qui était l’ordinaire), tous les citoyens, à partir de l’âge de vingt ans, se réunissaient au-dessus de l’agora dans l’endroit qu’on appe-

  1. En latin demonstratium genus, ce qu’on a traduit en français par le terme malheureux de genre démonstratif.