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Platon[1], Alcibiade raconte son intrépidité au siège de Potidée (432-429) et à la bataille de Délium (424). À Potidée, il brave les intempéries, il montre un courage admirable, et sauve Alcibiade blessé. À Délium, dans la déroute des Athéniens, il se retire lentement, d’un air si résolu que personne n’ose l’attaquer ; le général lui-même, Lachès, qui marchait à côté de lui, semblait moins courageux[2].

Il se tint soigneusement à l’écart de la vie publique, convaincu qu’elle était inconciliable avec l’entière indépendance de sa parole et avec les nécessités de ce qu’il regardait comme sa mission[3]. Il fut pourtant obligé deux fois de faire acte de citoyen, et il dut chaque fois, aux péril de sa vie, résister ouvertement à une volonté toute puissante qu’il croyait injuste. En 406, il était président de l’assemblée, qui eut à se prononcer sur la procédure à suivre contre les généraux des Arginuses ; les passions populaires exigeaient qu’on les jugeât tous les neuf en bloc, malgré la loi ; Socrate ne voulut pas mettre aux voix la proposition et faillit être victime de sa résistance[4]. Quelques années plus tard, les Trente soumettaient Athènes à un régime de terreur : Socrate fut désigné avec quatre autres citoyens pour aller arrêter à Salamine un personnage dont les Trente avaient décidé la mort ; Socrate, seul, osa refuser d’obéir ; si l’oligarchie n’avait été renversée presque aussitôt, il eût certainement payé sa désobéissance de sa vie[5].

Socrate fut marié. Sa femme, nommée Xanthippe,

  1. Banquet, p. 219, E, et suiv.
  2. Une tradition rapportée par Strabon (IX, p. 403), Cicéron (Divin, II, 54), Diogène Laërce (II, 23) raconte qu’il sauva Xénophon à Délium. Mais ce n’est là qu’une variante de l’histoire relative à Alcibiade : Xénophon ne combattit certainement pas à Délium.
  3. Platon, Apol., p. 32, A et suiv.
  4. Platon, ibid. ; Xénophon, Hellén., I, 7, 15 : Mémor., I, 1, 18.
  5. Platon, ibid. ; Xénophon, Mémor., IV, 4, 3. Anecdote apocryphe dans Diodore de Sicile, XIV, 3.