de l’Église l’ont regardé comme un précurseur du christianisme[1]. Jean-Jacques Rousseau, dans un morceau célèbre, le compare et l’oppose à Jésus. De nos jours même, les uns l’attaquent comme un adversaire toujours vivant ; les autres lui demandent des principes et une foi[2]. Il n’avait pourtant rien écrit ; mais par ses disciples, par Xénophon, par Platon surtout, il est le père diune immense littérature, nouvelle à la fois par le fond et par la forme, et qu’on ne peut comprendre sans remonter d’abord jusqu’à lui. Il faut donc essayer de le faire connaître.
Socrate n’a laissé aucun livre ; nous en sommes réduits à le chercher dans les écrits de ses disciples, qui nous le montrent par échappées, de profil, et non sans mêler au portrait de leur maître, comme il arrive dans tous les portraits, quelque chose de leur propre ressemblance. Platon, sans doute, reproduit la doctrine de Socrate, mais il expose surtout celle de Platon. Xénophon, moins créateur, n’ajoute guère ami idées de son maître ; il est cependant plus personnel qu’on ne dit souvent ; de plus, comme il ne s’est nulle part proposé d’offrir une image complète des doctrines de Socrate et que, d’autre part, il est lui-même très peu philosophe, il est manifeste qu’il a négligé une partie considérable du vrai Socrate. De là, chez les modernes, bien des embarras et des divergences. Ajoutons cependant que les lignes essentielles, malgré tout, ne sont pas insaisissables. Platon et Xénophon, quand on sait les lire en faisant la part de leurs habitudes propres, s’accordent souvent. L’esquisse et les contours du portrait doivent être cherchés dans les Mémorables[3]. À ce premier dessin, Platon ajoute