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CHAPITRE III. — ÉCRIVAINS DIVERS

Critias, bien qu’élève des sophistes et de Socrate, paraît avoir écrit, dans ses œuvres en prose, plutôt avec le laisser-aller d’un grand seigneur qu’avec l’application d’un orateur de métier. Mais les fragments qui nous en restent sont trop courts pour que nous puissions les juger en pleine connaissance de cause[1].

Énée le tacticien, enfin, est un de ces spécialistes nombreux à la fin du ve et au commencement du ive siècle, mais presque tous perdus aujourd’hui pour nous, qui ont entrepris les premiers de mettre par écrit des idées que l’expérience leur avait inspirées sur un art qu’ils pratiquaient assidûment. On sait que divers poètes, Lasos d’Hermioné, Sophocle, passaient pour avoir composé des ouvrages sur certaines parties de leur art. Si ces livres étaient authentiques, c’étaient les plus anciens modèles de ce genre de littérature. Le traité De l’Équitation de Xénophon, est un ouvrage de même sorte ; on y lit en outre, dès le début, le nom d’un personnage nommé Simon qui avait précédé Xénophon dans la même voie. Un échantillon intéressant de cette littérature technique est arrivé jusqu’à nous ; c’est le traité de tactique d’un certain Énée, le même peut-être que cet Énée de Stymphale mentionné dans les Helléniques, et qui fut général des Arcadiens vers le temps d’Épaminondas[2]. Polybe signale un grand ouvrage d’Énée intitulé : Mémoires sur la stratégie (Περὶ τῶν στατηγηματικῶν ὑπομνήματα)[3]. C’est un extrait de cet ouvrage qui nous a été conservé[4]. L’auteur énumère

  1. Fragm. historic. (Müller-Didot), t. II, p. 68 et suiv. Cf. Lallier, de Critia tyranno, Paris 1874.
  2. Hell., VII, 3, 1. Cette indication, comme celles qui ressortent de l’ouvrage lui-même, nous conduit donc assez loin du temps d’Ion de Chios et de Critias, mais non des dernières années de Démocrite ou d’Hippocrate.
  3. Polybe, X, 44
  4. Le titre complet de cet extrait est : Τακτικὸν ὑπόμνημα περὶ τοῦ πῶς χρὴ πολιορκουμένους ἁντἐχειν. Édition de Hug, Leipzig, 1874. Cf ; l’étude du même savant, Æneas von Stymphalos, Zurich, 1877.