sa conclusion ; il y court, poussé par la préoccupation pratique et urgente de la cause à gagner, du décret politique à faire triompher. Au besoin, la clepsydre le ramènerait à son sujet. De là, chez les purs Attiques, des habitudes d’esprit nouvelles. Tandis qu’Hérodote, avec ses épisodes innombrables et son doux laisser-aller, rappelle la vieille épopée, Thucydide, au contraire, est bref et pathétique comme la tragédie ou comme l’éloquence.
Ce caractère est très frappant dans l’ensemble même de l’œuvre de Thucydide. Ce qu’il veut raconter, c’est la lutte politique et militaire de Sparte et d’Athènes ; rien de plus. Hérodote, racontant, lui aussi, la lutte de deux adversaires, la Grèce et l’Asie, et rattachant toute son œuvres à cette idée générale, avait trouvé le moyen d’y faire entrer la peinture de tout le monde connu des anciens. Il n’eût pas été plus difficile à Thucydide, s’il l’eût voulu, de rattacher à l’histoire de la guerre du Péloponèse une peinture plus complète de la Grèce de son temps. Il faut même avouer que la curiosité moderne lui en aurait su un gré infini. Quand nous songeons que cette période est celle où l’art d’Athènes a produit tant de merveilles ; quand nous nous rappelons, d’autre part, que l’Agora, dans le même espace de temps, a vu des rivalités d’influence et des luttes politiques si passionnées, nous nous prenons à regretter cette inflexible méthode littéraire de l’historien. Lui le comprenait et sentait si bien la grandeur intellectuelle de sa patrie (il l’a montré dans l’Oraison funèbre), qui surtout avait une intelligence si profonde de la politique, quel dommage qu’il n’ait pas voulu nous faire assister plus complètement à l’histoire intérieure d’Athènes dans cette seconde moitié du ve siècle ! Mais aussi quelle puissance d’attention et quelle rigueur de méthode dans cette concentration volontaire de tous