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LA POÉSIE MOQUEUSE 659

servir à rien, m'a permis de vivre tout simplement... En ou- tre, faites que je sois utile, non agréable, à mes amis. Les biens dont on parle, je n'en veux pas. Amasser, c'est un bon- heur d'escarbot, c'est une opulence de fourmi, dont je n'ai aucune envie. La justice, voilà ma part, et avec cela une richesse facile à porter, facile à gagner, qui fasse honneur à la vertu. Si j'obtiens cela, j'essaierai de me rendre propice Hermès et les chastes Muses, non par des sacrifices dispen- dieux, mais par une pieuse offrande de vertu. »

Dans une autre élégie en forme d*hymne, il saluait, comme sa divinité préférée, la vie à bon marché (EursXsta), avec ce tour d'esprit ingénieux qui s*alliait chez lui à la fierté du philosophe :

« Salut, divine maîtresse, objet d'amour pour les sages, Eutéleia, fille de la glorieuse Tempérance, c'est toi qu'hono- rent par excellence tous ceux qui s'exercent à la justice *. »

Ses hexamètres, autant que nous pouvons en juger, étaient une glorification, sous forme de parodie, de la doctrine cynique aux dépens des autres doctrines con- temporaines. Cratèsy prenait pour texte divers passages de Y Odyssée^ qu'il s'amusait à détourner de leur sens et qu'il adaptait à ses vues. Dans un voyage fictif chez les morts, imité de la Ne>cuia d'Ulysse, il passait en revue quelques-uns des philosophes contemporains, pour se moquer d'eux.

« Je vis aussi Stilpon qui soufifrait cruellement dans Mégare, où est, dit-on, la couche de Typhœus; c'est là qu'il disputait, et ses amis se pressaient autour de lui; ensemble, ils pour- suivaient la vertu selon la lettre, jusqu'à épuisement 2. »

Le meilleur de ses fragments en ce genre, c'est celui où, suivant de près la description de la Crète dans VOdys-

1. Julien, Discours, VI, 199 A. Fr. 2 Berg.

2. Diog. Laôrce, II, 118. Fr. 4 Bergk.

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