Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t3.djvu/629

Cette page n’a pas encore été corrigée

MÉNANDRE 617

laquelle il tremble, a renvoyé par jalousie une jeune servante. Le voilà hors de lui * : j

« Certes, elle va dormir maintenant sur les deux oreilles, la belle aux écus sonnants ! Elle a fait là une grande action et vraiment glorieuse ; elle a mis hors de la maison celle qui la tourmentait, elle a fait ce qu'elle voulait, afin que tout le monde ait désormais les yeux attachés sur son visage et qu'on sache bien qu'elle, ma femme, est ici la maîtresse. En vérité, il est joli son visage, l'âne au milieu des singes, comme dit le proverbe 2. Ahl je ne veux pas rappeler cette nuit maudite qui a été le principe de tous mes maux. Hélas ! Ai-je pu prendre pour femme cette Grobylé ? Elle avait seize talents, cela est vrai; mais un nez d'une coudée ! Et ce hennissement superbe, puis-je le supporter? Non, par Zeus Olympien, non, par Athéna, non I »

Quîntilien, en maître de rhétorique qu'il était, admi- rait tout spécialement chez Ménandre le don oratoire, l'invention et Télocution ; et, à cet égard, les plaidoyers nombreux insérés dans ses comédies lui paraissent de vrais chefs-d'œuvre ^. Aucun des fragments subsistants ne nous permet plus de juger de ce mérite particulier. En revanche, ils nous révèlent delà manière la plus frap- pante le moraliste et le philosophe. Les réflexions géné- rales devaient abonder dans la bouche de ses personna- ges ; mais il savait les approprier à la situation et à rhumeur de chacun d'eux. Beaucoup de ces réflexions étaient empruntées à la sagesse traditionnelle, au sens commun, à cette sorte de philosophie courante qui est à l'usage de tout le monde. Il semble qu'elles auraient dû

1. Fr. 402.

2. G'est-à dire, selon une explication ancienne, u laid entre les plus laids » (lice al(TxP<S^ ^v aîo-xpoiç, Mantissa proverb. 4).

3. Quintilien, X, 1, 69 : Tanta in eo inveniendi copia et éloquent! i facultas... sed mihi longe magis orator probari in opère suo videtur, nisi forte aut illa mala judicia quae Epitrepontes, Epicleros, Locroc habent, aut meditationes in Psophodee, Nomolhete, Hypoholimaeo non omnibus^oratoriis numeris sunt absolutae.

�� �