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ÉPIGHARME 443

de bonnes mœurs, sans défaut grave, tu seras heureux en ménage ; mais si tu en rencontres une qui aime à sortir, à bavarder, à dépenser, tu auras pour toute la vie, en guise de femme, une élégante calamité ^ »

D'autres passages plus étendus nous font assister à do véritables discussions philosophiques. Linfluence de la dialectique naissante y est sensible. Épicharme voulait évidemment donner à son public le régal de ces argu- mentations subtiles et pleines de surprises qu'on inventait alors dans Técole et qui enchantaient déjà presque tous les Grecs, nés discuteurs. D'ailleurs, comme Socrate devait le faire un peu plus tard, il savait, par des exem- ples familiers, leur donner une forme populaire. Un per- sonnage, peut-être Ulysse, s'exprimait ainsi dans une do ses pièces :

« Eumée, la sagesse n'est pas le privilège de quelques-uns : tout ce qui vit est doué de raison. Dans la race des coqs, que font les femelles ? Sois-y attentif, et tu verras qu'elles ne mettent pas au monde leurs petits tout vivants; elles couvent leurs œufs, et ainsi leur donnent la vie. Ce qu'est cette sa- gesse, la nature seule le sait ; car c'est elle-même qui s'ins- truit spontanément 2.»

Voici, dans d'autres morceaux, la méthode interroga- tive, réchange des objections et des réponses. Un per- sonnage, qui fait le maître, démontre a un disciple quel- conque que tout change sans cesse, sauf les dieux; les

1. Id., 280. — Le mérite des sentences d'Épicharme était uni- versellement reconnu dans l'antiquité. Tout le monde lui faisait des emprunts. Jamblique, Vie de Pt/thag. 166 : Oî' te Yva)(i.oXoYT)<Tac xi twv xaxà Tov piov pouXofievot xàç 'E7ci;(ap[i.ou Siavota; Ttpoçépovxai xa\ <Txe5bv TravTEç aùià; o\ çtXodoçoc xaté^ouo-iv. Cf. Didot, Schol. grœca in Aris- toph., Prol. m : ttj ôè TconQast Yvtofiixéç. C'est aussi pour la finesse précise de son esprit que Cicéron le loue dans un passage de ses Tusculanes (I, 8) : Sed tu mihi videris Epicharmi, acuti nec insulsi hominis, ut Siculi, sententiam sequi.

2. Didot, 206-212.

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