412 CHAPITRE IX. — LE DRAME SATYRIQUE
tait aussi son défaut. Un drame qui côtoie le pathétique. mais qui n'a pas le droit d*y entrer, qui doit amuser et auquel pourtant le ridicule franc est interdit, est une chose d'une nature hybride, dont la perfection même doit toujours avoir quelque chose d'imparfait. Il a fallu sans doute toute la finesse de Tesprit attique pour réussir en ce genre et pour en observer les convenances propres. Mais Texcmple dWlceste prouve que de bonne heure les plus remarquables poètes dramatiques ont eu conscience de ces inconvénients et qu'ils ont essayé de s'y soustraire par une altération du genre lui-même.
Le langage du drame satyrique était en principe celui de la tragédie. Horace, dans ses préceptes, ne veut pas qu'on y emploie seulement les mots de la langue com- mune, et sur ce point ses recommandations sont en ac- cord évident avec Tusage dont témoignent la plupart des débris encore subsistants du théâtre satyrique *. Les termes poétiques, les alliances de mots hardies, bref tou- tes les manières de parler, plus ou moins rares et pom- peuses, qui appartenaient à la tragédie, se retrouvent dans c(>s morceaux. Elles y forment même, pour ainsi dire, le tissu du langage ordinaire des personnages. Tou- tefois, — et c'est là une différence caractéristique, — elles n'y sont pas, comme dans la tragédie, pures de tout mélange. Le drame satyrique exprime souvent dos idées, non seulement très familières, mais grossières, il ne re- cule même pas devant Tobscénité. En pareil cas, il faut bien que la langue soit grossière aussi. Maint fragment atteste que les poètes les plus soucieux de la dignité de leur art, Eschyle et Sophocle lui-même, n'hésitaient pas à se servir d'expressions appropriées aux choses^. Pour-
1. Epist. ad Pisones, 234 :
Non epfo inornata et dominantia nomina solum Vcrbaque, Pisoncs, satyrorum scriptor amabo.
2. Par exemple : Eschyle, fragment 17i; Sophocle, fragm. 295, 385,
381 Xauck.
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