402 CHAPITRE IX. — LE DRAME SATYRIQUE
beaux discours... Zeus, avec son tonnerre, ne me fait pas la moindre peur, A mon hôte; je ne sais pas en quoi Zeus est un dieu plus fort que moi. D'ailleurs je m'en moque; et si tu veux savoir combien, écoute ceci. Quand il verse d'en haut la pluie, moi, sous le rocher, j'ai un abri bien couvert ; et là, devant un veau bien cuit ou quelque bon morceau, produit de ma chasse, je festine. Étendu sur le dos, j'humecte douce- ment mon ventre, et, quand j'ai bu encore une amphore de lait, j'éclate dans mon manteau, et je fais autant de bruit que la foudre de Zeus. Ou bien encore lorsque le vent de Tbrace, Borée, répand la neige, je m'enveloppe de peaux de bêtes, j'allume mon feu et je me moque de la neige. Il faut bien que la terre, qu'elle le veuille ou non, produise de l'herbe et qu'elle engraisse mes moutons. Aussi je ne les sacrifie à per- sonne qu'à moi-même et jamais aux dieux; à moi et à mon ventre que voici, le plus grand des dieux. Car boire et man- ger chaque jour, voilà le vrai Zeus pour les gens sensés, et avec cela ne point se faire de chagrin. Quant à ceux qui ont établi des lois pour rornement de la vie humaine, je les en- voie se faire pendre. Mon intention est de continuer à me faire du bien, à moi, et de t'avaler, loi*. »
Par celui-là nous pouvons juger des autres. Dans la tragédie, les plus pervers ont de beaux discours à leur service ; dans le drame satyrique, l'impudence est sans limite, parce qu'elle n'est pas assujettie à la vraisem- blance. Il semble toutefois que certains poètes plus déli- cats, Sophocle tout au moins, aient eu peu de goût pour ces fanfarons d'athéisme et de cruauté. En revanche, nous remarquons, parmi les personnages de ses drames satyriques, celui de Momos, ce dieu du blâme, dont Lu- cien devait plus tard se servir si ingénieusement. Nous y trouvons aussi d'agréables inventions, telles que le rôle de la coquette Aphrodite dans le Jugement^ où on la voyait se parer pour le concours de beauté qu'elle allait affronter. Le forgeron de JVaxos, Kédalion, qui enseigna son art à Ilepheslos, figurait dans une autre de ses pîè-
1. Cyclope. 316-341.
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