PERSONNAGES LÉGENDAIRES 401
hardiesse. Son puissant génie avait dû réaliser en ce {çenre des créations à la fois bouffonnes et terribles, qui firent de lui dans l'opinion commune le maître incom- parable du genre. Si elles étaient venues jusqu'à nous, elles nous auraient révélé sans doute un aspect assez inattendu de Timagination hellénique. La génération sui- vante iidoucit et atténua tout cela. Ce qui était laid ou étrange fut indiqué discrètement, et, en fait de mons- truosité, celle des mœurs fut préférée à celle des formes. La légende d'Héraclès devint alors un des thèmes les plus souvent exploités. On lui emprunta toute une série do personnages, êtres malfaisants, brigands, tyrans fa- rouches ou simples coquins, qui avaient eu affaire au terrible justicier. Tels furent Omphale, Busiris, Syleus, sans parler duThanatos à'Alceste, Les légendes d'Ulysse, de Thésée, des Argonautes, celles de Thèbes et de Troie, d'autres encore donnèrent en foule des personnages du même genre, le géant Amycos, roi des Bébryces, Tauda- cîeuxSalmoneus, puis le rusé Autolycos, Sisyphe, le bri- gand Sciron. Le caractère du cyclope dans Euripide peut nous donner une idée de la façon dont ces rôles ont dû être traités. Les poètes avaient conscience du peu de réalité de ces personnages, de leur invraisemblance in- time, et ils ne cherchèrent pas à la dissimuler. Le cy- clope d'Euripide est un ogre, qui parle et agit comme tous les ogres, et par suite le poète ne se soucie aucune- nient d'expliquer ses sentiments au point de vue humain. Seulement, par instinct dramatique^ il les condense en leur prêtant une certaine unité, une netteté frappante qu'ils n'avaient pas dans l'ancienne légende. Ce mangeur d'hommes a des principes, et il les expose à Ulysse, avant de le dévorer, dans une profession de foi insolente et cy- nique.
« C'est la richesse, mon petit homme, qui est le dieu des sages. Tout le reste, ce sont des mots bien sonnants et de
Hist. delà Litt. grecque. — T. Iir. 2G
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