L'OBSERVATION 33l
marquée en maint passage avec son éloquence impatiente et incisive. Il y a des classes de la société qu'il méprise, d'autres qu'il déteste, d'autres encore qu'il tient pour suspectes. L'athlète, que tout Je monde alors admire et acclame, cet homme fier de ses muscles et lourd d'esprit, ce héros de palestre, robuste et slupide, il l'a en horreur ou en dégoût *. Les devins aussi, fort écoutés dans Athènes au temps delà guerre du Péloponnèse, lui sont insupportables; autant que la tragédie le lui permet, il stigmatise en eux l'esprit d'intrigue et la basse avidité ^ Il se défie des Orphiques, des coureurs de religions nou- velles, des gens enrobes blanches, sectateurs d'abstinen- ces, qui tendent à remplacer la saine morale par des pra;- tiques dévotes ^ Il méprise les hérauts, racescrvile, tou- jours inclinée devant les puissants du jour ^. Mais tous ceux-là ne forment que de petits groupes dans la cité. Eh voici un bien plus important, bien plus actif: les orateurs, et derrière eux les politiciens. Ce sont les maîtres de l'as- semblée, les véritables souverains d'Athènes. Autant Eu- ripide estime Thonnête homme qui exprime franchement sa pensée, autant il déteste les intrigants qui font de la parole un métier et de ce métier un instrument de popu- larité. Leurs moyens, il les connaît, et, avant Démos- thène, il les signale : ce qui les rend forts, ce sont les passions qu'il excitent pour s'en servir et la hardiesse im- pudente qu'ils font passer pour franchise ^ . Dans la tragédie, de tels jugements ne peuvent guère se produire que par allusions, mais ces allusions sont fréquentes chez Euripide, et elles donnent à certains passages de ses piè- ces un air de satire.
4. Antiope, fr. 199 Nauck.
2. Iphig, à Aiilis, 520.
3. Hippolyte, 955.
4. Oreste, 887; Troyennes, 425; Hécube» 992.
5. Oreste, 904 : 0opu6w xe ttctwo; xàfiaOsï 7rappr,(Tta. Voir tout lo morceau. Cf. Héciibe, 254.
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