longées et s’attachant avec passion aux images d’où rayonne l’espérance suprême :
« Ô roi lycien, que de la corde d’or de ton arc — puissent ces traits qui ne sont qu’à toi, ces traits que rien n’arrête, voler au loin, — traits de guérison et de salut ! et viennent avec eux ces flambleaux divins, — ces brandons éclatants d’Artémis, qu’elle agite, bondissante, — dans la montagne de Lycie. — Et celui qui porte la tiare d’or, je l’appelle aussi, — lui qui a le même nom que cette terre, — Bacchus au front empourpré, dieu d’évohé, — pour qu’abandonnant son cortége de ménades, — il apparaisse dans la lueur — toute resplendissante — des torches de pins, chassant le dieu cruel, abominable à tous les dieux. »
Dans beaucoup de stasima de Sophocle, la grandeur de la pensée ajoute au charme naturel de sa poésie lyrique un autre genre de beauté. Une idée générale, limpide et simple, mais très haute et très large, qui naît des événements mêmes du drame, apparaît tout à coup en pleine lumière, et s’y déploie magnifiquement dans les strophes du chœur comme les circuits d’un fil d’or dans un tissu aux belles nuances. Dans Antigone, quand la violation du décret récent vient d’être dénoncée à Créon sans que l’auteur en soit encore connu, le chœur se met à chanter, non sans un certain effroi religieux, l’audace de l’homme. Il le montre, avec une merveilleuse richesse d’expressions, conquérant les mers et les traversant « sous le grondement des flots amoncelés », domptant la terre infatigable qu’il assujettit « au cycle des labours, renaissants d’année en année », soumettant à ses volontés les animaux de l’air et des eaux, ceux des forêts et des champs, assurant enfin sa vie contre la dureté des éléments, fondant les villes, fier de sa parole et de sa pensée, mais impuissant contre la mort. En quatre strophes, pleines d’un élan superbe et d’une grave philosophie, toutes les victoires de l’humanité passent ainsi