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la poésie et dans la musique, dans la déclamation et dans la mimique.

On ne saurait douter que par suite la tragédie n’ait été en ce temps pour le spectateur grec une admirable école *. Ses enseignements avaient d’autant plus de force et d’autorité qu’ils étaient plus solennels et plus rares. Une grande pompe, un immenserassemblementd’hommes, une sorte de communion spontanée des âmes dans un même sentiment religieux, la joie de la fête, la piété, l’enthousiasme, la curiosité, tout contribuait adonner aux choses de la scène une puissance extraordinaire. Dans ces grands jours de la poésie et de la religion, les âmes étaient plus vibrantes et plus impressionnables, les esprits étaient plus dociles, et les paroles du poète retentissaient au- dessus de la foule avec un éclat merveilleux. C’était par le théâtre surtout que le Grec se familiarisait avec le passé légendaire de sa race. Là, toutes les traditions antiques étaient sans cesse remises sous ses yeux. Il voyait les héros nationaux en personne, il les regardait agir et souffrir, il les entendait parler, il mettait ses sentiments à l’unisson des leurs. La Grèce des vieux âges, sous cette forme poétique, mais pourtant réelle, devenait pour lui quelque chose de vivant et de concret, qui prenait corps dans son imagination.

Et cette école d’hellénisme était en même temps une école de morale, au sens le plus large du mot. Tous les problèmes de la vie humaine ne se posaient-ils pas d’eux- mêmes dans ces drames pleins d’humanité ? Destinée, devoir, passion, héroïsme, liberté, imprudence, vertige d’orgueil, toutes ces choses grandes, obscures, admirables ou terribles, qui s’agitent en nous et autour de nous, le théâtre ne cessait de les mettre en lumière. La raison

1. Aristoph., Grenouilles, 1064 : Toîç [lèv gar ïraiSapcoKiiv — ïaxi 6t- ôao-xaXo; oart; çpàCet, toÏç i?j6û(rtv ôà 7cotT)Tac. Cf. Olympiodore, Vie de Platon, c. 3.

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