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CONCLUSION 627

précision. Un Tliucydidc, d'autre part, y eût rais plus d*éloqucnco et moins d'anecdotes, plus de stratégie et moins do miracles. En revanche, Hérodote a répandu sur toute la scène une sorte de grandeur religieuse et je ne sais quelle naïveté héroïque dont le charme est péné- trant.

��VI

��L'apparition du livre dTIérodotc est, dans l'histoire de la littérature grecque, un fait capital. Comme il est le premier chef-d'œuvre de la prose grecque, on peut dire qu'il ouvre une période; mais, surtout, il marque la fin d'un âge. Effleuré déjà d'un premier rayon de l'atticisme, il appartient cependant encore à la période de l'équilibre des races et de l'indépendance littéraire des dialectes grecs; il est un fruit do la civilisation ionienne; c'est le plus beau fruit de cette civilisation finissante, et c'en est le dernier. Déjà l'atticisme règne au théâtre : il va bien- tôt régner dans l'éloquence, dans l'histoire, dans la phi- losophie, amenant partout avec lui des qualités plus vi- riles et plus fortes. Par le goût des recherches, par l'am- pleur do la composition, par l'art d'écrire, Hérodote an- nonce répanouissement prochain de l'histoire savante et éloquente ; mais la manière dont se manifestent chez lui ces qualités rappelle aussi les logographes et les poètes. L'antiquité n'offrira plus un second exemple de cette histoire encore toute engagée, pour ainsi dire, dans l'épo- pée; de cette histoire populaire et vivante, écho de la parole à la fois naïve et conteuse d'un âge qui n'a rien encore de « livresque»; elle ne reverra plus ce mé- lange extraordinaire de curiosité scientifique, d'imagina- tion romanesque, de bonhomie, de finesse avisée, de piété

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