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506 CHAPITRE IX. — PHILOSOPHIE ET HISTOIRE

de certaines affirmations, nous échappent, et nous en sommes réduits à conjecturer, ou, plus simplement, à ignorer. Essayons cependant, sans y mettre trop de ri- gueur, de ressaisir le fll, là où Ton peut encore Tentrevoir.

L'ouvrage débutait par une afCrmation méprisante de rignorance et de la sottise humaines ^ Plusieurs fragments reproduisent la même idée ; ils appartenaient peut-être à cette sorte de préface où Heraclite commençait par rompre ouvertement en visière à Topinion des autres hommes. Le savoir d'un Hésiode, d'un Pythagore, d'un Xénophane, d'un Hécatée, n'élait pas pour lui donner le change ^ : « Grand savoir, disait-il, mauvais savoir '. » Ce qui trompe les hommes, c*est qu'ils s'en rapportent aveuglément à leurs sens : « Les yeux et les oreilles sont de mauvais témoins, si Ton a TAme d*un barbare^. » Il faut s'élever du visible à l'invisible *. Il faut suivre non les impressions individuelles, mais « la raison com- mune » (Çuvo; Xoyo;), dont Heraclite n'est que l'interprète*.

Or, qu'enseigne cette raison sur l'ensemble des choses (wepl Toij -avTo;)? Elle enseigne que la variété apparente est une illusion. Tout est un '. Mais celte unilé n'est pas immobile, comme le croyait Xénophane. Elle n'est, au contraire, que mobilité. Tout s'écoule et rien ne subsiste '. Le flux des êtres ressemble au courant d'une rivière '. Le fond des choses, c'est le feu, qui s'allume et s'éteint tour à tour, éternel, mais toujours en mouvement, toujours

��1. Fragm, 1 (MuUach). Aristote {Hhét. III, 5, p. 1407, B, 13-16) dit que ce passage formait le début du livre.

2. Fragrn. 14, 15, 89.

3. lIoXu(xaO(T) xaxoTeyvÎT) (fragm. 15).

4. Fragm. 23.

5. Fragm. 96.

6. Fragm. 58, 92.

7. Fragm. 92.

8. Platon, Cratyle, 402, A : Ilâvia /wpeî xai oJîkv ^i-ivct.

9. Diogène Laërco, IX, 8 : 'Peîv Ta ci/a TiotaiioO ô;xr,v.

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