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tilés, si misérablement pulvérisés, et dont les trois quarts sont cités par les anciens non pour leur beauté, mais pour une particularité quelconque de grammaire, de métrique ou d’histoire, il y en ait si peu qui soient tout à fait insignifiants. Par malheur, si Ton peut traduire une idée, il est difficile de traduire un style très délicat.

Trois ou quatre fragments se rapportent à la beauté de la fille de Lycambès, Néobulé, et l'image de la jeune fille nous apparaît dans sa grâce ionienne un peu molle et sensuelle :

Elle aimait à se parer d’une branche de myrte ou d’une belle fleur de rosier, et sa chevelure ombrageait ses épaules et son dos [1].

Les cheveux et le sein parfumés, elle eût donné de l’amour à un vieillard [2].

Est-ce Néobulé encore dont il est question dans ces vers charmants :

La grande force de l’amour dont son cœur était plein répandit sur ses yeux un brouillard épais et déroba le sentiment à sa poitrine délicate [3].

A maintes reprises, Archiloque exprime sa douleur amoureuse avec une éloquence poignante.

Misérable, consumé de désir, je suis sans vie ; la cruauté des dieux me perce d’atroces douleurs jusque dans la moelle de mes os [4].

Le désir, ô ami, me dévore et me dompte [5].

  1. Fragm. 29.
  2. Fragm. 30.
  3. Fragm. 103.
  4. Fragm. 84.
  5. Fragm. 85. — Rien ne prouve, bien entendu, qne ced fragments se rapportent à son amour pour Néobulé. Tout ce qu’on peut dire, c’est que cet amour avait dû lui inspirer plus d’un vers analogue à ceux-ci.