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THÉOGNIS 151

connu par expérience : les révolutions l'ont ruiné» et il a senti la douleur d'être sans défense contre les maux. Ce qu'il reproche à la pauvreté, ce n'est pas seulement la somme de souffrances physiques qu'elle apporte : de cela, il ferait bon marché ; mais c'est qu'elle brise la fierté de rhomme et le rend esclave. Il a exprimé sou- vent cette idée avec une vigueur admirable :

Plus que tout le reste, ô Kyrnos, la pauvreté brise Tbonnôle homme; plus que la vieillesse chenue, plus que la fièvre. Pour lu fuir, ne crains pas, ô Kyrnos, de te précipiter dans la mer profonde ou dans des gouffres abrupts*. L'homme vaincu par la pauvreté ne peut plus rien dire ni rien faire; sa lan- gue même est enchaînée Mieux vaut mourir, quand on est

pauvre, que de laisser ronger sa vie par l'horrible misère *.

Cette conception de la vie, chez cette &me passionnée, produit sans cesse la colère et la révolte. Il a soif de vengeance :

Quand un homme a souffert une grande injustice, il rape- tisse ; quand il s'est vengé, il grandit de nouveau '.

Flatte ton ennemi en paroles, et quand il est sous ta main, frappe- le, sans chercher de prétexte -*.

Frappe du talon la plèbe imbécile, pique-la de la pointe de Taiguillon, mets-lui sur la tête un joug pesant : car tu ne trouveras nulle part, entre tous les hommes que regarde le soleil, un peuple aussi ami de la servitude *.

Que le vaste ciel d'airain, terreur des humbles mortels, me tombe sur la tète et m'écrase, si je ne viens en aide à ceux qui m'aiment et si je n'apporte à mes ennemis la terreur et la souffrance «.

i. Selon, en an cas pareil, avait fui la pauvreté en redevenant riche par le commerce.

2. V. 173 et suiv.

3. V. 361-363.

4. V. 364-365.

5. V. 846-849.

6. V. 869-872.

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