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TYRTÉE 109

mémoire des lettrés et des hommes d'action, c'est la foi patriotique dont ils sont pleins : jamais la religion ci- vique n'a parlé un langage plus fier, plus ardent, plus convaincu. G est l'accent qui en fait la beauté beaucoup plus que le style. On y sent une âme guerrière, héroïque- ment croyante au devoir et à l'honneur. D'ailleurs, à la profondeur et au sérieux du sentiment, s'allie le don de voir les choses et de les peindre, le sens plastique, pour ainsi dire, qui anime les idées abstraites, qui les fait vivre, qui met sous nos yeux, dans la vérité vive, fami- lière, parlante, de leur attitude, le brave et le lâche, le bon hoplite « bien campé sur ses jarrets, rivé au sol, mordant sa lèvre », et le misérable vaincu, dépouillé de tout, vagabond et mendiant.

Le premier morceau, cité par l'orateur Lycurgue *, comprend trente-deux Vers.

Il est beau pour un brave de mourir au premier rang en combattant pour sa patrie; mais quitter sa ville natale et ses champs féconds pour aller mendier çà et là, traînant après soi sa mère vénérée, son vieux père, ses enfants en bas âge, et la femme qu'on a épousée vierge, c'est le dernier "degré de la misère.

Il faut combattre les uns près des autres, en se. sentant les coudes (wap* àXXviXowi (livovre;). Il est honteux de voir les vieux tomber au premier rang tandis que les jeunes se sauvent. La mort même, laide pour le vieillard, a de la grâce dans « Taimable jeunesse » ; trait charmant et bien grec. Un jeune guerrier, « admiré des hommes, aimé des femmes tant qu'il vit, reste beau encore quand il tombe au premier rang. » Suivent les deux vers cités plus haut sur l'attitude du bon hoplite. — Avons-nous là, comme le croit Bergk, une élégie entière? ou bien,

1. Contre Léocrate, 107 ; fragm. 10.

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