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Me dit assez souvent que je n’ay mérité.
Vn subject si parfaict sans luy rendre service
Et ce triste penser m’est un cruel supplice.
Ne suis-je pas perdu au milieu de mes feux.
Je n’ay encor osé luy déclarer mes vœux.
Toutes fois bien aymer ce n’est pas une injure,
Je luy dois faire voir la peine que j’endure.
N’ay je pas bien mal fait de sy longtemps tarder ?
J’ay peu de hardiesse, Je ne veux amender,
La cause de mon mal mérite de le dire.
Et d’excuser encor ma plainte et mon martyre.
Cette face angelicque a sceu ravir mes sens
Quy pourroit résister à ses traits innocens ?
Quy pourroit regarder cette parfaicte image
Sans luy donner son cœur et son amour en gage ?
Ce sont les préjugés de ſes perfections
Quy peuvent m’apporter des consolations.
Et quoi[illisible] que pour cette heure il n’y ayt apparence
De quérir mon ardeur ny mon impatience
Si ne puis-je advouer dans mes ressentimens
Que je ne dois treuver aucuns soulagements.
On me dit c’est en vain, de tenter la fortune,
cette femme n’est pas une femme commune.