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dans cette chambre. La chambre d’hôtel où je suis seul.

Comme du plus terrible péché, je m’accuse de penser aux autres, et non à moi.

Moi, les autres ?

Dès qu’il n’y a plus de moi, ils me deviennent indispensables, et si je me sens prêt à haïr la chambre d’hôtel, c’est que je n’y trouve aucune trace de leur existence. Pour un peu je renierais les colères antérieures et déclarerais que chacun d’eux me fut une révélation et d’autant plus éblouissante que plus étrangère.

Je n’ai pas la force de découvrir en moi la promesse des surprises nécessaires et je ne sais quel nettoyage par le vide a chassé de cette pièce le réconfort d’un peu de poussière et jusqu’au souvenir de la chaleur humaine.

J’ai passé mon doigt sur le marbre d’une cheminée. Il était nu et si froid qu’il m’a bien fallu conclure que cette buée sur une glace ne s’était point épanouie au souffle de quelque