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maquereau. Je fais de la boxe pour gagner ma vie. Il faut être gentil avec moi. »

L’étranger venu à Paris pour ses jeunes apaches tâtait vos biceps. Il était ravi : « Charmant petit poisse », s’extasiait-il, et vous,triste qu’on vous aimât pour votre corps et surtout ce coin précis qu’une main d’homme soi-disant bien élevé n’avait pas honte d’explorer, vous ragiez : « Pas touche. »

L’étranger ricanait. Il vous invitait à danser. Une fille, qui vous aimait sans doute, vous injuriait lorsque vous partiez avec l’étranger. Vous caressiez les cheveux de la fille et ne répondiez point à ses ordures.

L’étranger vous déshabillait.

Fier de votre corps aussi proprement que vous l’eussiez été de votre intelligence, vous faisiez des exercices de souplesse, de force, d’acrobatie, puis vous chantiez une chanson tendre. L’étranger qui vous avait cru comestible, qui avait voulu vous acheter comme une boîte de cigarettes, un fruit pour jouir de