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peau affamante sous ce jersey léger, léger. J’ai eu bien chaud ce jour-là au cirque.

J’ai chaud dans la rue de Toulon. Mais je suis joyeux. Est-ce le soleil ? Le regard de cette fille qui me bouscule ? Il me faut m’arrêter. Mon oreille entend un gémissement triste. Je me rends compte enfin que tout ce trouble est né de cette partie de moi-même dont on m’avait enseigné à avoir un peu honte.

Je suis un homme.

Dès que mes yeux peuvent à nouveau comprendre les maisons, la vieille église, le marché au poisson, un coin de rade là-bas, je pense qu’une paix nouvelle en moi ne va point tarder à descendre.

Mon père et ma mère sont loin.

Je les retrouverai tout à l’heure à l’hôtel.

Je suis la fille au caraco rouge.

De grands marins sont joyeux sur le quai.

Leurs cous ont troué leurs vestes et par l’échancrure c’est la victoire d’une chair puissante. Maillots bleus, peaux brunes