Page:Crevel - Le Clavecin de Diderot, 1932.djvu/91

Cette page n’a pas encore été corrigée

je luttai, afin d’éviter les pièges d’un complexe de castration, dont, mon sommeil, soudain, s’était rappelé, que, jadis, un psychanalyste m’avait dit que j’étais sinon affecté, du moins menacé.

Ainsi, en arrivai-je à vouloir me venger sainement de ces couilles, mes couilles couchées sur un lit d’incisives et de canines : une femme échevelée courait de par les rues, à la main, un objet qui était à la fois un sexe d’homme en état d’érection et un revolver. Cette femme, la dame des caprices à l’indienne, relevait ses jupes, introduisait l’arme dans la forêt pubique, l’y enfonçait, appuyait sur la gâchette. Un coup sourd et secret. Elle tombait morte, et moi qui n’allais pouvoir jamais me consoler de ce qu’un objet à faire la vie, en elle, eût fait la mort, et quoique rien ne pût racheter l’abominable méprise, je voulais quand même, victime des préjugés familiaux, qu’elle eût au moins un très bel enterrement. Mais un enterrement pas trop triste. Aussi, fut-ce une grande joie que de voir venir à ma rencontre, une chanteuse qui, spécialisée dans le Satie, allait savoir animer de sa verve la musique funèbre.

— Et beaucoup mieux que tu ne peux imaginer, mon petit, s’écria-t-elle, devinant ma pensée.