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grain d’orge rencontre les conditions qui lui sont normales, s’il tombe sur un terrain favorable, il subit sous l’action de la chaleur et de l’humidité une métamorphose spécifique : il germe, le grain disparaît comme tel, il est nié ; il est remplacé par la plante née de lui, qui est la négation du grain. Or quel est le cours normal de la vie de cette plante ? Elle grandit, fleurit, est fécondée et produit à la fin, de nouveau, des grains d’orge ; et, dès que ceux-ci ont mûri, la tige meurt ; elle aussi, de son côté est niée. Et, comme résultat de cette négation de la négation, nous avons, de nouveau, le grain d’orge initial, mais multiplié, dix, vingt ou trente fois.

Or l’examen au microscope analytique des vieilles formes culturelles, à quoi s’obstinent ceux qui prétendent consacrer leur vie à l’étude de l’humain, quel élément de vie décèlera-t-il dans les trente fois centenaires épis de Cérès, ou, même dans les très proches fleurs séchées du Romantisme ?

Sous prétexte d’étudier les grains d’orge, on les frustre de la chaleur, de l’humidité indispensables à leur métamorphose spécifique. Deux négations égalent une affirmation : sans doute les grammaires doivent-elles en convenir, mais que cette loi ne se contente pas de régner sur le monde des formes écrites ou