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d’un immeuble voisin prononcèrent des mots dont elle rougit sans savoir si c’était de plaisir ou de confusion. Elle courut à la salle à manger et le tapis de table sur les épaules revint fermer la maudite fenêtre ; mais toute une semaine elle fut perplexe, n’osa croire que son père avait eu raison d’accuser la mémoire et les efforts de la mémoire ; d’autre part, elle était tentée de s’abandonner pleinement à la morale catastrophique et d’essayer de chocs affectifs.

Vivant, le professeur Dupont-Quentin se fût certes désolé de voir sa fille appliquer de tels préceptes, mais cette même fille pouvait-elle, sans offense à sa mémoire, retourner aux habitudes initiales d’insouciance et se composer un personnage fictif faussement conscient et organisé ?

Elle se rendit à Saint-Sulpice où elle espérait rencontrer son confesseur l’abbé Trublet.

Le digne homme n’était pas à la sacristie ; elle fit le tour de l’église, par orgueil posa le pied sur la tringle de cuivre qui figure le passage du méridien terrestre.

Dès qu’il la vit, le prêtre, dans son église comme chez lui, cria : « Bonjour mademoiselle Scolastique. » Elle découvrit que son prénom était ridicule, mais l’abbé Trublet la crut folle et en partant elle n’avait plus envie de marcher sur le méridien.

Place Saint-Sulpice elle rencontra Boldiroff.

SCOLASTIQUE — Mon père fut un douloureux chercheur.

BOLDIROFF — Vous m’amusez. Le père Dupont-Quentin, ce petit vieux sans mysticité, un chercheur ?

SCOLASTIQUE — Monsieur Boldiroff, je vous en prie.

BOLDIROFF — Mademoiselle... D’abord dans votre